interview



Jean Dufaux et Philippe Adamov (qui viennent de publier le premier Tome de L'Imprératrice Rouge chez Glénat) répondent à Alkemya : rencontre avec deux épicuriens.

Comment êtes vous entré dans le monde de la bande dessinée ?
Adamov : Au départ j'ai travaillé dans le dessin animé (NDLR : c'est à 19 ans qu'il travaille sur le pilote de Gandahar d'après Caza - avec René Laloux) puis j'ai réalisé beaucoup d'illustrations pour Ulysse 31, un dessin animé franco-japonais. Par la suite, je suis entré chez Bayard Presse et j'ai fait pour Okapi 46 pages qui ne sont pas sorties en album par ce que la Directrice ne le souhaitait pas (NDLR : "Seule au monde", en 1983, récit fantastique crée avec Xavier Seguin). Par contre cette expérience m'a permis de me faire remarquer par Henri Filipinni qui était directeur de collection chez Glénat et qui lançait le journal Vécu. C'est là que j'ai commencé "Le Vent des Dieux" avec Patrick Cothias (1985).
Dufaux : Je n'ai pas pensé à la bande dessinée, pas tout de suite, bien que je vienne d'une formation image et texte. J'ai écris des choses en dehors du monde de la B.D. Je pensais plutôt roman, cinéma. J'ai aussi été journaliste. Puis un jour, j'ai rencontré un jeune dessinateur, Bernard Copenz, aujourd'hui disparu du métier, qui voulait une petite histoire. Cette nouvelle a été acceptée par Jean-Luc Vernal le rédacteur en chef du journal Tintin. Et depuis, je n'ai jamais cessé de travailler dans la bande dessinée, qui est la rencontre idéale entre le dessin, le texte et l'image. J'ai eu la chance de travailler avec de très grands dessinateurs. J'ai pu écrire des histoires que j'avais envie d'écrire et pour des auteurs pour lesquels j'avais envie d'écrire, des gens que j'estime comme : Rosinski, qui est mon ami, Griffo, Labiano, Marini. Je ne peux les citer tous : je suis certain d'en oublier. Et puis un jour, j'ai eu envie de proposer un scénario à Adamov. Comme nous étions très timides l'un et l'autre, quelqu'un s'est dit "Je dois faire le pas pour eux". C'était Jean-Claude Camano, éditeur chez Glénat. C'est ainsi qu'il nous a présentés. On s'est mis autour d'une table et on a discuté. Je voulais proposer à Philippe un projet d'envergure, ambitieux, que j'avais en tête : la Russie. Je lui ai proposé le froid, le blanc et la glace. Je lui en ai parlé sans savoir à ce moment là qu'il avait des origines russes. C'était il y a plus d'un an maintenant.

Vous habitez à une certaine distance l'un de l'autre. Comment avez-vous démarré le projet ?
Adamov et Dufaux : On se téléphone !
Dufaux : Il y avait un casting impressionnant avec beaucoup de personnages. Adamov à dû préparer le travail.
Adamov : L'étude de la psychologie de ces personnages a représenté un travail important.

Pourquoi avoir choisi le personnage de Catherine II puisque l'album ne respecte pas vraiment l'histoire ?
Dufaux : Je voulais un personnage féminin confronté au pouvoir. Pour la Russie, il y a un nom qui m'est venu tout de suite : c'était Catherine II qui a trempé dans des affaires de sexe et de pouvoir. Elle s'est imposée au scénario qui est un mélange de SF et d'historique. On ne voulait pas un scénario trop compartimenté, SF d'un côté, histoire de l'autre, mais un mélange. Au départ, le lecteur ne doit pas trop savoir sur quelle planète il se trouve et quelle direction il va prendre. On a mélangé les deux et je crois que c'est ça qui est intéressant. A cheval entre passé, présent et futur.

Vous êtes parti sur combien d'albums ?
Adamov : Au moins cinq. Le premier est une mise en place du squelette de l'histoire et des personnages.

Certains personnages ne paraissent pas très "définis", d'autres semblent être appelés à jouer un rôle plus important que dans le tome 1 : Que vont-ils devenir ?
Dufaux : Historiquement, si les gens connaissent un peu leur histoire de Russie, ils savent tous que Orlov a un rôle important dans la mécanique du pouvoir autour de Catherine II puisque c'est lui qui a tué Pierre. Il y a aussi un personnage marquant bien que dans l'ombre, il s'agit de la petite Nadia. Qu'importe si un personnage joue un rôle prépondérant ou secondaire, moi ce qui m'intéresse c'est qu'on le sente en mouvement, qu'il ne soit pas là pour faire joli. Tout le monde doit bouger, avancer ou reculer.

Parmi ces personnages mineurs ou majeurs, pourriez-vous être vous-même surpris par leur propre évolution ?
Dufaux : J'ai déjé été surpris une première fois par un personnage comme Rostand. C'est un personnage qui est puissant et qui m'a impressionné tel que l'a dessiné Philippe. Il a pris plus d'importance que je ne l'avais prévu d'abord, grâce au dessin d'une part et la personnalité qu'Adamov lui a donné d'autre part. Donc ça bouge, il faut que ça reste en mouvement, en vie.

Pouvez-vous faire une révélation sur le tome 2 ?
Dufaux : il sera en couleurs, cartonné. (Rires avec Adamov)

Qu'aimez-vous ou que n'aimez-vous pas dans la vie ?
Dufaux : Je n'aime pas les gens trop sérieux. On peut être très sérieux dans la vie mais avec une certaine légèreté. Je n'aime pas les gens qui donnent du poids à des choses futiles. Ou qui n'aiment pas l'alcool. On a choisi aussi les gens qui sont à notre table et on fréquente des gens qu'on aime bien. Je n'aime pas non plus la manipulation et la mort liée au monde du pouvoir. Le pouvoir s'occupe de vous-même si vous ne vous occupez pas de lui. C'est bien connu, il y a trois choses auxquelles vous n'échapperez pas : le pouvoir, la mort, et les impôts.
Adamov : Je n'aime pas la démagogie.
Le tome 1 de ce qui risque de devenir une longue série
Éditeur : Glénat
Prix indicatif : 78,00 francs



propos recueillis par Laurent Ryder.


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